Je m'efforçais d'ignorer les regards des deux autres sur mon bras. Si Minatsue n'y avait pas tellement fait attention (à moins qu'elle ait été trop discrète pour que je la surprenne), je sentais Akiro le fixer, et ce pendant un bon moment. J'envisageais un instant de lui faire comprendre qu'il était impoli et que son attitude m'indisposait, mais finalement je laissais pisser. C'est moi qui était trop à cran dés qu'il était question de mon bras draconique, j'en était bien conscient. Et au moins c'est deux-là avaient eu la décence de ne pas me poser de questions.

        Pour éviter d'y repenser, je tachais de ne pas perdre Râ de vue, et j’accélérais le pas. La marche m'aidait à me vider les pensées, et je perdais mon regard dans les virevoltes du pokémon dans les branches. Comme il devait se calquer sur notre vitesse, il s'amusait comme il pouvait et s'efforçais de passer entre les branches en nous attendant. Il n'y arrivait pas toujours et mes deux compagnons de route et moi nous en priment quelques une sur le visage, mais dans l'ensemble il se débrouillait bien. Je lui demandais quand même de se concentrer un peu, histoire qu'il ne nous égare pas dans la forêt, mais rien y fit : il me cria dessus de sa voix chantante d'oiseau, l'air de dire "T'occupe ! Je gère !", et il continu son manège. J'aurais bien demandé à Akiro de m'en dire plus sur les deux légendaires... Dialga et Palkia, car je savait qu'il était calé en mythologie, mais le silence me plaisait. J'oubliais toute ces considérations, et je me contentais d'écouter le bruit que produisait nos trois paires de pieds en touchant le sol.

        Nous continuâmes notre chemin dans la forêt des pins enneigés. Maintenant que j'avais enlevé mon bandage, je souffrais de la fraîcheur ambiante. Mon bras, changé en profondeur par la charge du Léviator était aujourd'hui du type Dragon. Je souffrais donc d'une certaine sensibilité au froid du côté droit... et je rappelais plusieurs fois Râ à mes côtés pour lui demander de me réchauffer. Dans le cas présent, j'avais une grande nostalgie du désert de mon enfance. Pouvoir sortir torse nu dans la rue me manquait, le climat de Madrigal n'était pas assez chaud à mon goût. Toutefois je n'avais rien de particulier contre le froid, mais je n'aurais vraiment pas dis non à un bon manteau. Le débardeur n'était vraiment pas adapté à un te environnement, et sans l'assistance de Râ, j'aurais fini complètement gelé. La chaleur étrange qui nous avait accompagné pendant toute la descente de la montagne n'était plus. Et puis la température se rafraîchissait au fur et à mesure que nous montions.

        Je m'en étais rendu compte pendant un moment, mais cela faisait déjà un moment que le sol était devenu pentu. Nous avalions les mètres de dénivelé en continu, et je ne parvenais pas à savoir vers quelle endroit nous dirigeaient Râ à cause des arbres. Mais ces derniers s'espaçaient de plus en plus, et le terrain se découvrait au fur et à mesure que nous avancions. Cela faisait déjà plus de deux heures que nous avions quitté le feu de camps. Après près d'une journée entière passée à marcher, il semblait que nous voyions enfin la sortie de cette forêt.

        Un quart d'heure plus tard, nous parvenions enfin à la lisière de la forêt.

        Devant nos yeux, se dressait maintenant la plus grande chaîne de montagne que nous je n'avais jamais vu. La plus imposante se dressait au milieu de tout les autres, son sommet éclairée par la lumière du soleil couchant.

- Le mont du Règne... , soufflais-je.